Année 2024: Peu d’avancées, plus de reculades

L’édition d’ « Expression Politique » que vous tenez en main regroupe quelques actualités phares de l’année 2024. La rédaction a choisi quelques morceaux choisis pour un exercice de rappel mémoire. Ledit exercice n’est pas aussi simple mais il est nécessaire dans un contexte où l’information est fugace. De façon subjective, « Expression politique » a choisi de rappeler des informations qui, à notre sens résument l’année. Cette dernière caractérisée par des reculades et des avancées au plan politique.
Pour ce qui concerne les reculades, nous pouvons noter le retour en force de la répression venant notamment de l’Administration territoriale. Ce ministère s’est particulièrement fait remarquer par de nombreuses saillies en interdisant à tour de bras des activités politiques, et en s’immisçant dans la vie interne de certains partis. Les morceaux choisis dans ce journal sont là pour le témoigner.
Autre reculade : la Justice. En effet, alors que l’Assemblée nationale a adopté, le 27 novembre dernier, la loi portant règlement pour l’exercice 2023, la juridiction des comptes remet en question les opérations de trésorerie de l’Etat. Pour expliquer pourquoi elle doute des comptes de l’Etat, la Chambre des comptes prend l’exemple de la rubrique des transferts de crédit. La Juridiction révèle que, durant de l’exercice 2023, le Gouvernement a effectué des transferts de crédits en déséquilibre à hauteur de 496 835 677 474 FCFA en débit et 884 535 677 474 en crédit. Cependant, apprend-on, le ministère des finances n’a transmis comme justificatif que le décret du Premier Ministre du 13 août 2024, lui-même en déséquilibre de 20 941 259 818 pour un montant total débiteur de 790 944 974 615 F CFA et créditeur de 770 003 714 797 F CFA. Curieusement, ce rapport de la Chambre des comptes et passé sous silence et personne n’a été inquiétée.
La fonction présidentielle prend des coups
La fonction présidentielle aussi a pris des coups rudes. A titre d’illustration, l’on a vu que même les « Très hautes instructions » du chef de l’Etat sont devenues facultatives. A preuve, il y a une crise dans le choix de l’encadrement technique des Lions indomptables. Ça a duré des mois. Le secrétaire général de la Présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, a beau signer et répercuté des textes et des nominations pour choisir un encadrement technique de l’équipe fanion de football, c’est plutôt le ministre des Sports qui se faisaient humilier par le président de la Fédération camerounaise de football.
Le doute sur les « très hautes instructions du président de la République » a même atteint le ministère de la Justice. 04 août 2024. Laurent Esso, le ministre de la Justice assiste à la projection du film documentaire « Paul Biya, un Grand homme d’État au Destin prodigieux », réalisé par Cathy Meba et Solange Edimo. A un moment de son allocution, Laurent Esso, développe un discours énigmatique qui semble s’adresser à quelqu’un ou à un groupe de personnes dans l’entourage du chef de l’Etat. Il déclare à cet effet : « Le président Paul Biya a beaucoup d’égard et de courtoisie à l’endroit des uns et des autres. Le président Paul Biya évite l’arbitraire par un respect scrupuleux de la légalité. Malheureusement, monsieur le président de la République, il nous revient que, enivré par les actes qui nous place à certaines fonctions, nous avons souvent tendance à privilégier les voies de fait, et à ne faire valoir que notre égo. La plupart du temps, nous pensons certainement que, les actes qui nous ont désigné, nous ont aussi donné l’omniscience, je dirai même la science infuse. Très souvent, nous nous comportons comme si grâce à ces actes, nous savons tout. Nous ne prenons même plus la peine d’écouter comme vous le faites vous-même monsieur le président. Nous savons tout, sur tout. Et nous pouvons tout bien que vous monsieur le président de la République vous demeurez constitutionnellement le seul maître à bord. La sagesse populaire nous enseigne attention, le président Paul Biya, ne dort que d’un seul œil ».
Solidarité gouvernementale en lambeaux
La solidarité gouvernementale aussi a volé en éclat. Dans une récente vidéo en circulation dans les réseaux sociaux, le délégué général à la Sûreté nationale, Martin Mbarga Nguele, affirme que certains membres du gouvernement n’appliquent les orientations du chef de l’Etat en matière d’entretien routier. La lutte contre la consommation de chicha a aussi suscité des tensions au sein du gouvernement camerounais. Alors que le ministre de la Santé publique mène des opérations inopinées pour interdire ces pipes géantes dans les bars, restaurants, casinos et autres lieux de loisirs, le ministre de l’Administration territoriale, a ordonné, le 23 septembre, aux gouverneurs de mettre un terme à ces contrôles.
Last but not the least, Henri Eyebe Ayissi, le ministre des Domaines, du cadastre et des affaires foncières (Mindcaf), est sur le grill. Ayant attribué le 20 juin dernier des titres fonciers à des tiers, le membre du gouvernement vient de désavouer par le président de la République. En effet, dans une correspondance datée du 26 juin 2024, Ferdinand Ngoh Ngoh, le secrétaire général à la présidence de la République (SGPR), a instruit le Mindcaf de rapporter ses décisions d’attributions sur ces parcelles de terrain, en plein cœur de Yaoundé, au quartier couramment appelé « Bastos ».
Au plan humain, le pays a subi des catastrophes avec au bout des pertes en vies humaines importantes. La question de la protection civile est revenue au goût du jour mais sans réponse satisfaisante. Les villes principales du pays, Douala et Yaoundé sont devenues de plus en plus sales.
Collectivités territoriales décentralisées
Toutefois, malgré ces reculades, l’année 2024 a quand-même réservé quelques espoirs ou avancées. Notamment pour ce qui concerne la situation financière des collectivités territoriales décentralisées (CTD) préoccupe le gouvernement. A cet effet, une loi a été adoptée dans le cadre le cadre de la session parlementaire en novembre dernier, portant sur la fiscalité locale. Selon l’exposé des motifs déposé par le gouvernement, ce projet de texte a pour objectif, « d’une part, de réformer le cadre juridique actuel, notamment la loi n° 2009/019 du 15 décembre 2009, dont un nombre important de dispositions sont réputées caduques, et, d’autre part, de renforcer l’autonomie financière des Collectivités Territoriales Décentralisées (CTD), en vue de mieux répondre aux exigences de la loi n° 2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code des Collectivités Territoriales Décentralisées et de la SND30 ».
Oumarou Mey