Présidentielle 2025: Interpellations de responsables politiques à Douala
À la suite du scrutin présidentiel, plusieurs figures de l’opposition, dont Anicet Ekane, Florence Titcho et Djeukam Tchameni, ont été interpellées à Douala le 24 octobre dernier.
Dans les couloirs d’un siège vide du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem) au quartier Akwa à Douala, les voix se font basses, les regards inquiets. « Ils ont été enlevés sans mandat, sans convocation, comme des criminels », souffle un militant. Depuis le 24 octobre dernier, le président du parti, Anicet Ekane, sa trésorière Florence Titcho et Djeukam Tchameni, figure de l’Union pour le Changement 2025, sont « détenus par la gendarmerie ».
Selon le Manidem, tout commence à Douala, quand Anicet Ekane se rend au Groupement de la gendarmerie territoriale pour s’informer du sort de son neveu interpellé plus tôt dans la journée. Il n’en ressortira pas. Arrêté sur place, il est transféré de nuit à Yaoundé, sans information donnée à sa famille, renseigne un cadre de cette formation politique de l’opposition. « On ne sait même pas où il a dormi la première nuit, ni dans quel état il se trouve », confie une proche, avant d’ajouter, la voix tremblante : « il a besoin de ses médicaments ».
Florence Aimée Titcho, enseignante et syndicaliste, a été arrêtée à Akwa alors qu’elle allait chercher son fils à l’école, apprend-on. Quant à Djeukam Tchameni, il a été « happé » à son domicile, selon le communiqué du parti. Le Manidem dénonce une « vague d’arrestations arbitraires » et parle d’un « message d’intimidation à l’égard de ceux qui refusent la confiscation de la vérité des urnes ». Ainsi, dans la foulée, le parti a publié un autre communiqué, plus virulent, où il accuse les services de sécurité d’avoir « cambriolé » le domicile d’Anicet Ekane.
« Des rumeurs d’images truquées circulent sur les réseaux sociaux : on y voit prétendument des armes, de l’argent et des documents présentés comme saisis chez le leader du Manidem ». Le parti crie à la manipulation. « C’est un montage grossier destiné à salir un homme qui a passé cinquante ans à lutter pour son pays », tranche Paul Jaurès Tina, porte-parole du parti. À Yaoundé, le ton est plus mesuré, mais l’inquiétude est la même. Dans un communiqué rendu public le 25 octobre, le Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn), dirigé par Cabral Libii, a exprimé sa « vive préoccupation » et a appelé à « la transparence et au dialogue ».
Son secrétaire national aux droits de l’homme, Christian Ndjock Nkongo, a rappelé que « la présomption d’innocence demeure un principe fondamental et non négociable ». Des voix indépendantes sont également montées au créneau. L’avocat Me Richard Tamfu, co-directeur de campagne de Cabral Libii, parle d’un « acte d’intimidation ». Il estime que ces interpellations visent avant tout « ceux qui ont soutenu ouvertement Issa Tchiroma Bakary ». Selon lui, « la démocratie ne peut pas survivre si chaque opinion divergente est assimilée à une menace ».
À mesure que la date du 27 octobre, celle du verdict du Conseil constitutionnel, approche, la tension ne fait que monter. Le Manidem et d’autres formations alliées espèrent une reconnaissance du vote en faveur d’Issa Tchiroma Bakary, candidat du Front pour le salut national du Cameroun (Fsnc). Mais la confiance envers les institutions semble érodée.
H.T

