Projets de développement: L’Etat mise sur la digitalisation pour mobiliser l’épargne locale

Le 13 février dernier, le Directeur général du Trésor, Moh Sylvester Tangongho, a discuté des défis et des opportunités liés à cette stratégie lors d’un échange avec la communauté des affaires à Douala.

Le Cameroun s’attaque à un défi majeur pour son développement économique : la mobilisation de l’épargne locale. Lors d’une rencontre avec la communauté des affaires, le 13 février dernier à Douala, Moh Sylvester Tangongho, Directeur général du Trésor, de la Coopération financière et monétaire (Dgtcfm), a présenté les grandes lignes du plan de financement du budget 2025, estimé à 7 317,7 milliards de FCFA. L’occasion pour lui de souligner les enjeux d’une meilleure mobilisation de l’épargne locale afin de financer les projets d’infrastructure du pays dans un contexte où les banques détiennent près de 80% des titres émis.

Les discussions ont ainsi porté sur trois axes principaux : le rôle des investisseurs institutionnels, l’inclusion financière des populations non bancarisées, et la digitalisation du processus de souscription aux titres publics. De l’avis d’Experts, plusieurs défis freinent la participation des Camerounais à l’achat de titres publics : « le pays reste largement dépendant des financements extérieurs, en raison de l’accès limité aux marchés internationaux. Les banques locales, soumises à des contraintes prudentielles strictes, peinent à soutenir l’endettement public. La mobilisation de l’épargne nationale est insuffisante, et un marché secondaire peu développé aggrave cette situation ».

En effet, malgré la forte pénétration du mobile money (26 millions de comptes), moins de 0,01% des Camerounais investissent dans les titres publics, et une grande partie de l’épargne informelle (estimée à 1 000 milliards FCFA) reste inexploitée faute de mécanismes adaptés. De plus, les barrières systémiques, telles que des seuils d’investissement élevés (entre 100 000 et 1 million FCFA), des procédures d’acquisition longues et complexes, des formalités administratives contraignantes, et des frais d’intermédiation élevés, limitent l’accès aux petits épargnants.

« Cette digitalisation pourrait générer jusqu’à 500 milliards FCFA par an »

Face à ces obstacles, la digitalisation des souscriptions aux titres publics se profile comme une solution stratégique pour élargir la base des investisseurs et faciliter l’accès aux titres. Pour le Dgtcfm, grâce à l’intégration avec les plateformes de Mobile Money, telles que MTN et Orange, il devient possible de faciliter les souscriptions, rendant l’investissement plus simple et moins coûteux. Cette digitalisation pourrait générer jusqu’à 500 milliards FCFA par an, avec un potentiel de 50 milliards dès la première année.

Un autre atout majeur, serait la création d’un marché secondaire, permettant aux investisseurs d’échanger leurs titres de manière fluide et transparente. Pour l’État et les institutions financières donc, la digitalisation offrirait alors plusieurs avantages : l’élargissement de la base d’investisseurs, un marché obligataire plus stable grâce à la diversification des souscripteurs, et une réduction des coûts liés à la collecte des fonds via l’automatisation des processus. Pour les citoyens, ce modèle présenterait une véritable opportunité d’investissement à moindre coût, avec une gestion simplifiée et sécurisée.

D’après les données de la direction du Trésor, le Cameroun dispose d’un atout majeur avec un volume mensuel de transactions via Mobile Money estimé à 2 000 milliards FCFA. Ce marché représente une opportunité pour capter la petite épargne et la canaliser vers des investissements publics. L’intégration de la Blockchain, pour assurer une transparence totale dans les transactions, pourrait être une avancée technologique clé, renforçant la confiance des investisseurs.

L’État pour sa part, pense Moh Sylvester Tangongho, doit jouer un rôle central en soutenant les opérateurs Fintech dans la collecte de cette épargne, en leur offrant des garanties institutionnelles. Dans cette dynamique, le Dgtcfm recommande la mise en place d’émissions obligataires dédiées à des projets concrets pouvant favoriser l’adhésion des petits épargnants. À titre d’exemple, une émission spécifique pour financer des infrastructures telles que le pont sur le Wouri offrirait aux investisseurs une visibilité directe sur l’impact de leur investissement.

Hélène Tientcheu

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