Liberté de la presse: La mobilisation syndicale à la peine

À l’occasion de la 32e journée mondiale de la liberté de la presse, le Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) dresse un tableau sombre de la situation actuelle des médias au Cameroun et tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur l’état préoccupant de la liberté d’expression dans le pays.

Le 3 mai dernier, à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, les membres du syndicat national des journalistes du Cameroun, section Littoral, se sont mobilisés comme à l’accoutumée, à la place du gouvernement à Bonanjo. Ces derniers revendiquent leur droit dans l’exercice de leur fonction et veulent se faire entendre. Au cours de cette mobilisation, le bureau exécutif national du syndicat a livré un message poignant, dressant un tableau sombre de l’état de la presse nationale. Entre censure, précarité, absence de soutien étatique et répression syndicale, les journalistes camerounais semblent engagés dans une lutte de survie. Il a notamment dénoncé l’aggravation des violations des libertés démocratiques et professionnelles, ainsi que l’impunité persistante entourant les assassinats de journalistes. Le syndicat pointe du doigt la marginalisation de la presse écrite, la non-application de la convention collective, la suppression des délégués du personnel dans certaines rédactions et le refus d’allouer une aide significative à la presse privée.

Autant de signes, selon l’organe dirigé par Marion Obam, d’un « système qui n’a pas besoin d’une presse de qualité, libre et indépendante », peut-on lire. Malgré ces obstacles, le syndicat a appelé à l’union des forces vives de la presse, y compris les jeunes en formation, pour faire bloc contre l’injustice et bâtir un organe de régulation autonome. C’est du moins ce qui a marqué la rencontre nationale du syndicat organisée à Yaoundé en mars 2025 pour envisager la création d’un organe d’autorégulation. Les syndicalistes revendiquent la sécurité des journalistes, le respect des engagements gouvernementaux en matière de conditions de travail et une véritable reconnaissance du rôle des médias dans la démocratie. Ils dénoncent ainsi l’absence de subvention structurelle à la presse, la non-application de la convention collective, l’interdiction des élections sociales dans certaines entreprises et la coupure arbitraire de salaires.

À l’échelle internationale, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a souligné dans son message lu ce jour que la liberté de la presse est « l’épine dorsale de la transparence, de la justice, de l’égalité et des droits humains ». Il a condamné les attaques croissantes contre les journalistes dans les zones de conflit, notamment à Gaza, et mis en garde contre les dérives possibles de l’intelligence artificielle, capable de véhiculer désinformation, discours de haine et manipulations massives. Guterres a rappelé l’importance du pacte numérique mondial et des principes pour l’intégrité de l’information comme garde-fous indispensables dans cette ère technologique. Par ailleurs, l’Unesco met l’accent sur les opportunités et les risques liés à l’IA. L’organisation reconnaît que si cette technologie peut soutenir le journalisme d’investigation et la vérification des faits, elle représente aussi un danger par sa capacité à générer des fake news, ou encore à favoriser une surveillance accrue des professionnels des médias.

Placée sous le thème « Informer dans un monde nouveau – L’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias », cette 32ᵉ journée de la liberté de la presse interpelle tous les acteurs de la sphère médiatique à plus d’engagement. Il faut le dire : face à une presse institutionnelle fragilisée, les réseaux sociaux ont pris une place prépondérante dans la circulation de l’information. Malheureusement, plutôt que d’être un espace de liberté, ils deviennent le terrain d’une désinformation massive. Le public, privé d’accès à une information rigoureuse, se retrouve souvent à la merci des fake news. Cette situation met en évidence l’urgence de soutenir une presse professionnelle, éthique et régulée. Pour le syndicat, la défense de la presse est indissociable de celle de la démocratie et des droits du peuple. « Les grandes et nobles victoires découlent de grands sacrifices dans l’action », rappelle le syndicat. Plus que jamais, la liberté de la presse au Cameroun dépendra de la capacité collective à résister à l’oppression et à bâtir une presse libre, indépendante et digne.

 

Charles Totchum

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