Extrême-Nord: Mécontentement des commerçants de Moulvoudaye

Des manifestants réclament au meilleur des cas la fermeture du marché à bétail de Kalfou.
Le 28 février dernier, la concurrence entre le marché à bétail de Kalfou, dans le département du Mayo-Danay, et celui de Moulvoudaye, dans le département du Mayo-Kani, a débouché sur une manifestation. Les témoignages récoltés sur le terrain indiquent que les commerçants de Moulvoudaye, en colère, ont empêché aux bergers de bétail de circuler pendant plusieurs heures. Dans une courte vidéo diffusée par le journaliste Dieudonné Batassou, basé à Yagoua près de Kalfou, sur sa page nommée Sahelo, on entend des manifestations dire : « rien ne peut passer ici ».
Ces derniers appellent aussi le gouvernement à venir résoudre leur problème. Un haut responsable de l’Association nationale des commerçants à bétail du Cameroun (Ancbc), qui a choisi de garder l’anonymat, fait savoir que ces manifestants réclament au meilleur des cas la fermeture du marché à bétail de Kalfou, sinon que ce marché hebdomadaire ne se tienne plus le vendredi comme celui de Moulvoudaye. Car depuis l’ouverture d’un marché à bétail à Kalfou au mois d’août 2025, celui de Moulvoudaye, jadis très fréquenté par les vendeurs de bétail venus du Tchad voisin, est devenu désert.
Avant de décider de manifester, comme ils l’ont fait le week-end dernier, l’Association des ressortissants et sympathisants de l’arrondissement de Moulvoudaye (Arsam) a écrit au gouverneur de la région de l’Extrême-Nord, pour se plaindre de cette situation. « Porteurs de la voix de nos fils et filles, avons l’honneur de venir auprès de votre haute bienveillance vous faire part du comportement malsain de nos voisins et frère peuple de l’arrondissement de Kalfou qui ont intentionnellement décidé de mettre à mal l’économie de notre arrondissement », comme on peut le lire dans cette correspondance de l’Arsam.
Les auteurs rappellent que depuis plus de 80 ans, le marché de Moulvoudaye se tient le vendredi et celui de Kalfou le lundi. Ils dénoncent donc le fait qu’il se tient depuis le 30 août dernier un marché « parallèle » à Kalfou le vendredi. Une concurrence déloyale qui menace la commune de Moulvoudaye, dont le marché à bétail est le principal vecteur économique.
Si Moulvoudaye a de la peine à rivaliser avec Kalfou c’est à cause de sa position géographique. Les bergers tchadiens, qui approvisionnent la majorité des marchés à bétail dans la région de l’Extrême-Nord, entrent au Cameroun en traversant le fleuve Logone. Ils arrivent ensuite à Yagoua et à Kalfou. Pour rallier Moulvoudaye en quittant Kalfou, il leur faut parcourir une distance de 17 kilomètres en mauvais état et souvent infestée de bandits.
C’est pour s’épargner la peine d’arpenter cette route que les bergers tchadiens ont obtenus qu’un marché soit créé à Kalfou, comme le rapporte notre source à l’Ancbc. « Il n’était pas possible de choisir un autre jour parce que les bergers tchadiens sont occupés dans d’autres marchés périodiques », confie notre source pour expliquer pourquoi le marché à bétail de Kalfou se tient les vendredis comme celui de Moulvoudaye, désormais en difficulté. Le différend court toujours. Et à en croire des sources proches de cette affaire, les commerçants de Moulvoudaye ne sont pas près d’abandonner ce combat.
O.M.