Insalubrité: Douala croule sous le poids des ordures

Les ordures produites depuis la période des fêtes de fin d’année jonchent les rues et les routes, s’accumulent dans les marchés, obstruent les ponts et les caniveaux, dégagent des odeurs nauséabondes au grand désarroi de la population et donnent à la capitale économique du Cameroun un visage de plus en plus dégradé.

Au carrefour Ndokoti en face de la station Tradex, tout comme au marché des rails à Bonaberi et plein d’autres carrefours de la ville, les images sont frappantes : des montagnes d’ordures jonchent les trottoirs et rendent l’air irrespirable. Les déchets produits pendant la période festive de fin d’année (les débris de cartons, les plumes de poulets, etc.) sont toujours à la traîne et attendent d’être ramassés. « Douala est une ville poubelle, impossible de circuler sur le trottoir dans un carrefour comme Ndokoti à cause des ordures non ramassées », révèle Victor Tiamabeu, un passant rencontré à ce carrefour. La situation est d’autant plus choquante pour Terrence Chimi, propriétaire d’un comptoir de vente à ce carrefour qui a dû changer l’emplacement de son commerce pour s’éloigner des odeurs et continuer le business. « Je n’en pouvais plus de ces odeurs et des répercussions sur mon commerce, si bien que j’ai choisi de venir m’installer ici, à la station », confie-t-elle.

Dans les marchés animés de la ville, tels que ceux des rails à Bonaberi et Dakar à village, la situation est tout aussi préoccupante. « Dans un marché comme celui des rails, on parle désormais de carrières de poubelle ; nous n’en pouvons plus de ces odeurs qui dominent le marché », déclare une commerçante. En effet, dans ce marché du 4ᵉ arrondissement, l’espace réservé au dépôt d’ordure est saturé et les populations continuent de déposer leurs déchets auprès des comptoirs de certains vendeurs. Les étals de fruits et légumes en occurrence, sont entourés de sacs plastiques et autres déchets organiques, attirant à leur tour des nuisibles. Les commerçants et les clients, conscients de la problématique, expriment leur frustration face à un manque flagrant de solutions durables. « Chaque matin, nous devons ramasser nous-mêmes les ordures devant notre stand. Parfois, l’équipe de la propreté passe, mais l’incivisme des passants est un véritable frein », déplore une commerçante du marché.

Depuis plusieurs semaines, les agents de l’hygiène et de la salubrité du Cameroun (Hysacam), la société chargée de la collecte et du traitement des ordures ménagères au Cameroun, n’assurent plus le ramassage à Douala. Pour essayer de comprendre les raisons de cet arrêt d’activités, nous nous sommes rapprochés du service communication de ladite entreprise, qui n’a pas voulu nous renseigner. Cependant, il fait bien de souligner qu’en 2024, Hysacam a inauguré le tout premier centre de transfert de déchets sans reprise dans la capitale économique du Cameroun. La mise en œuvre des centres de transfert des déchets permettra à Hysacam de réduire les coûts liés au ramassage des ordures dans les villes, selon Jean-Pierre Ymele, le directeur général d’Hysacam. Ce dernier avait également déclaré :« ce premier centre peut transférer 800 tonnes de déchets par jour et réduire de moitié (50 %) la collecte journalière des déchets, estimée à 1 800 tonnes dans la capitale économique ».

L’environnementaliste Didier Yimkoua, quant à lui, révèle dans l’une de ses sorties sur les réseaux sociaux que le taux d’enlèvement d’ordures à Douala et Yaoundé oscille autour de 45 %. Afin de ressortir l’impact de ce laxisme sur l’environnement, voire la santé des populations riveraines, le membre du mouvement Écologie en marche souligne que les déchets plastiques ou électroniques, cancérogènes, une fois engloutis dans la terre ou déversés dans les cours d’eau, contaminent les sols et les espèces halieutiques. Pour y remédier, « nous avons proposé l’achat à 50 FCFA le kilo d’ordures ménagères. Si on greffe la valeur marchande, je suis convaincu qu’on pourra débarrasser nos villes des ordures », confie-t-il. Car les efforts du gouvernement et des municipalités peinent à répondre aux besoins d’une population en constante croissance. L’explosion démographique, l’urbanisation rapide et le manque de gestion efficace des déchets contribuent à un cercle vicieux d’insalubrité.

Charles Totchum

About Post Author

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résoudre : *
10 − 2 =


Enregistrez vous à notre newsletter