« Incitation à l’insurrection »: Maurice Kamto visé par une plainte

Suite à ses propos tenus à Paris le 31 mai dernier, l’opposant fait l’objet d’une plainte déposée auprès du tribunal militaire de Yaoundé par l’Observatoire du développement sociétal (ODS).

Une allocution à l’étranger fait vaciller le débat politique au Cameroun. Le 31 mai dernier, lors d’un meeting à Paris en France, l’opposant Maurice Kamto, président du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), s’est exprimé devant des membres de la diaspora camerounaise. Quelques jours plus tard, une plainte est déposée à Yaoundé par l’Observatoire du Développement Sociétal (ODS), une organisation de la société civile. En ligne de mire : des propos jugés « subversifs », « violents » et « attentatoires à la sûreté de l’État ». Le dossier a été transmis au tribunal militaire, compétent en matière de sécurité intérieure.

Selon le Coordinateur général de l’ODS, Lilian Koụlou Engoulou, signataire de la plainte, Maurice Kamto a franchi un seuil jugé inacceptable par l’ODS. En comparant la situation camerounaise à celle du Sénégal, où les violences politiques ont fait plus de cinquante morts en deux ans, l’ancien candidat à la présidentielle aurait, selon l’organisation, « préparé psychologiquement ses partisans à un affrontement post-électoral ». La phrase la plus polémique ? « Les survivants resteront pour reconstruire le pays ». L’ODS reproche à Maurice Kamto de légitimer l’insurrection au nom du changement démocratique, au mépris du cadre légal en vigueur. L’association estime qu’il y a là une « banalisation de la mort » et une « instrumentalisation politique de la diaspora ».

La plainte s’appuie notamment sur les articles 114 et suivants du Code pénal camerounais, qui répriment les atteintes à la sûreté de l’État, notamment l’appel à l’insurrection, à la rébellion ou à l’usage de la violence pour renverser l’ordre constitutionnel. Figure centrale de l’opposition depuis la présidentielle de 2018, Maurice Kamto ne cesse de dénoncer les dérives du régime en place. Mais ses méthodes et ses mots divisent. S’il appelle officiellement à « faire respecter les lois votées par l’Assemblée nationale », son ton, dans cette allocution, a été perçu par ses « détracteurs » comme une incitation à « ne pas attendre » et à « se battre » pour le changement.

Pour ses partisans, le leader du MRC se contente de souligner la responsabilité citoyenne dans un processus électoral jugé verrouillé. Pour l’ODS, en revanche, ses propos tracent une ligne rouge : l’appel à la confrontation violente. Ce rebondissement judiciaire interroge sur le climat préélectoral au Cameroun, à quatre mois d’échéances capitales pour l’avenir politique du pays. De l’avis de certains analystes, la judiciarisation du discours politique, particulièrement via le tribunal militaire, soulève de nombreuses questions sur la liberté d’expression, la sécurité nationale et la place des oppositions dans l’espace républicain.

Reste à savoir si cette plainte sera suivie d’une enquête effective, voire d’un mandat d’arrêt. En attendant, elle remet au goût du jour les tensions croissantes entre le pouvoir, l’opposition et une diaspora de plus en plus active dans les combats politiques à distance.

H.T

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